Agression sexuelle lors d’un bivouac sur la plage de l’Hermitage

Rédigé le 03/05/2024
Régis Labrousse

Une affaire particulièrement sordide était jugée ce jeudi dans le cadre de l'audience correctionnelle du tribunal judiciaire de Saint-Denis. Une jeune femme a été sexuellement agressée dans son sommeil alors qu'elle dormait paisiblement sur la plage de l'Hermitage en novembre 2022. L'homme, âgé de 32 ans, sera confondu par son ADN suite au minutieux travail des enquêteurs de la compagnie de gendarmerie de Saint-Paul.

« C’est le temps qui effacera les choses et ce n’est pas la justice qui dira s’il y a eu pénétration ou pas !« , sont les mots forts de la victime à la barre du tribunal judiciaire de Saint-Denis. En effet, alors que le magistrat instructeur avait renvoyé le mis en cause devant la cour criminelle de La Réunion pour des faits de viol, la chambre de l’instruction en a elle, décidé autrement. Alors que la victime a toujours indiqué avoir subi une pénétration digitale, la chambre de l’instruction avait estimé que la preuve d’une pénétration n’était pas apportée faute de lésions constatées par l’expertise. Comprenez donc que les faits initiaux de nature criminelle sont correctionnalisés. On parle donc d’agression sexuelle et non plus de viol. Le mis en cause ne risque plus 20 ans de réclusion, mais cinq ans de prison.

Les faits se déroulent dans la nuit du 26 au 27 novembre 2022 sur la plage de l’Hermitage à Saint-Gilles. Deux amies, après avoir dîné, décident de camper sur la plage. Elles s’installent avec leur duvet dans leur hamac et s’endorment paisiblement. Vers 4 heures du matin, l’une d’entre elle, se réveille brusquement après avoir senti des attouchements. Elle se retrouve nez-à-nez avec un inconnu qui prend la fuite. Elle porte plainte dans la foulée. Pour autant, c’est le début d’une descente aux enfers pour la jeune femme : « Ça m’a complétement éteinte« , témoigne-t-elle ce jeudi à la barre, un an et demi après les faits. Malgré l’absence de témoins, les enquêteurs finissent par remonter sur un suspect un mois après les faits grâce à l’ADN récolté sur les vêtements de la victime.

Il est mis en examen pour des faits de viol et placé en détention provisoire

Le suspect, Kevin J., connu de justice pour des faits liés aux stupéfiants, est convoqué et placé en garde à vue. Lors des deux premières auditions et malgré les preuves tangibles, il nie. Il finit par reconnaître des attouchements à la troisième audition. Il est mis en examen pour des faits de viol et placé en détention provisoire. Pour sa défense, il invoque une forte consommation de stupéfiants au moment des faits et indique « ne pas comprendre ce qui lui a pris« , ajoutant, « je ne sais pas pourquoi, dans mon délire, je l’ai touchée« . Interrogé sur ses motivations par le président, le prévenu avoue « qu’il ne sait pas où il se serait arrêté » mais réfute « être un violeur« . Le président le reprend de volé en lui indiquant : « Le viol ou l’agression sexuelle, ce n’est pas que la violence, c’est aussi la contrainte ou la surprise« , rappelant à son souvenir que la victime était endormie en pleine nuit.

« Je ne pouvais pas ne pas venir aujourd’hui, mais je ne sais pas quoi en penser. Deux vies gâchées bêtement pour rien. J’étais à moitié endormie, il avait ses doigts en moi. Je suis pressée d’en finir », ajoute avec courage la victime à l’adresse du tribunal. Pour la partie civile, « il finit par reconnaître une agression sexuelle, mais jamais une pénétration. Pourtant, ce sont des faits de viol qu’elle a vécu. Elle a toujours gardé la même version, mais nous sommes aujourd’hui devant un tribunal correctionnel, c’est bien dommage« , plaide la robe noire.

« Il a agi par surprise sur une inconnue, c’est un véritable choix« 

Malgré ses excuses et une lettre envoyée à la victime pendant sa détention, la procureure fustige des faits « particulièrement graves » et regrette « une décision de la chambre de l’instruction qui nous prive d’un débat sur la pénétration« . La magistrate estime que cette affaire est « dans le spectre haut des violences sexuelles qui justifie une lourde peine« . « Il a agi par surprise sur une inconnue, c’est un véritable choix« , conclut la magistrate qui requiert une peine de quatre ans de prison avec maintien en détention.

« C’est une juste qualification des faits reprochés« , répond la défense. « La vérité d’une victime, n’est pas la vérité judiciaire. Rien n’établi médicalement qu’elle a subi une pénétration digitale. Il a reconnu ce qu’il a véritablement fait et ses regrets ne sont pas de circonstance« , plaide la défense.

Considérant des faits d’une particulière gravité, le tribunal condamne Kevin J., à quatre ans de prison avec maintien en détention.