Hugo tué à Saint-Joseph : 4 ans de prison ferme pour le chauffard “irresponsable” et “sans humanité”

Rédigé le 04/05/2024
Prisca Bigot

Le 14 octobre 2023, Hugo, âgé de 21 ans, trouvait la mort non loin du lycée Pierre Poivre à Saint-Joseph. Le jeune homme qui se rendait à vélo à la boulangerie où il travaillait a croisé la route de Loïc. À bord d'une Seat qu'il n'avait pas encore fini de payer, donc sans assurance, Loïc, en retard, roule à 70 km/h sur une route limitée à 30. Le choc est effroyable.

Ce samedi-là, il ne s’agissait pas “d’un malheureux accident mais bien d’une conjecture de manquements et du comportement du mis en cause”, insiste le procureur. Sous la violence du choc, le crâne d’Hugo a percuté le pare-brise de la voiture qui tentait de le dépasser. Pourtant, Loïc ne s’est pas arrêté. L’homme, âgé de 30 ans, cuisinier, était en retard pour aller, lui aussi, travailler. A 5H45, heure de l’accident, il était à Saint-Joseph alors qu’il devait être à 6H30 à Saint-Denis.

À cette heure, la rue Hippolyte Foucque à Saint-Joseph est déserte. Une infirmière qui réside à proximité du lieu de l’accident et qui a entendu le choc est venue réanimer une première fois Hugo avant d’appeler les secours. La jeune victime est transportée avec un trauma crânien, inconsciente, à l’hôpital de St-Pierre. “Six jours emplis d’espoir, de prière, à essayer de comprendre pourquoi il (l’automobiliste, ndlr) ne s’est pas arrêté”, explique à la barre le père d’Hugo. Ce père est d’abord arrivé sur les lieux, a vu le vélo plié en deux. Puis est arrivé en même temps que l’ambulance à l’hôpital et aperçu le visage en sang de son fils.

Pendant ce temps, Loïc a pris toute une série de décisions pour échapper à sa responsabilité. Sept mois après les faits, un temps passé derrière les barreaux en attendant son procès, il reconnait avoir “camouflé les preuves”. Loïc ne pouvait ignorer que les forces de l’ordre le recherchaient. Il a donc caché la voiture sous une bâche chez des amis et a changé le pare-brise étoilé par l’impact de l’accident. Loïc n’avait également pas fini de payer à un ami la Seat noire dans laquelle il circulait. L’assurance était donc toujours au nom du propriétaire, jeune conducteur. Loïc a fini par être retrouvé par les enquêteurs. Le trentenaire a appris le décès de la victime dans le bureau du juge d’instruction.

« Ma femme était enceinte »

Pourquoi ne s’est-il pas arrêté ? Pourquoi n’a-t-il pas alerté les secours, ne serait-ce de manière anonyme ? « J’ai eu peur, j’ai paniqué. Ma femme était enceinte. J’avais peur d’aller en prison”, finit par lâcher Loïc, plutôt taiseux, ahuri face au tribunal. La veille au soir, il avait par ailleurs fumé un joint. “J’avais mis mon clignotant et laissé plus d’un mètre de distance”, explique-t-il les faits. Il assure n’avoir vu aucune indication du cycliste, qui n’avait pas de casque, pour un changement de voie. En rentrant, le chauffard s’est confié à sa compagne. Cette dernière l’a incité à se rendre, mais Loïc n’a rien fait. Trois semaines après l’accident, ils ont perdu l’enfant.

Pourtant, par deux fois, Loïc a été condamné pour délit de fuite et conduite sans assurance par le passé. Son casier judiciaire porte au total quatre autres mentions dont une de vol et une autre pour agression sexuelle.

“Moi, j’ai perdu mon soleil”, livre la mère d’Hugo au prétoire, émue par la douleur. Le jeune homme est décrit par sa famille comme quelqu’un de souriant, dynamique, sportif qui avait l’espoir d’intégrer un restaurant étoilé.

“Irresponsable, il prend la fuite et n’a pas l’humanité de s’arrêter pour voir et ne serait-ce qui lui tenir la main. Il n’a qu’une idée en tête, c’est sauver sa peau”, plaide, pour la famille d’Hugo, Me Jean-Jacques Morel.” Il n’y a pas de hasard. Ce rendez-vous mortifère, c’est vous qui le provoquez en roulant trop vite”, insiste la robe noire à l’attention de Loïc.

“Les infractions routières ne sont pas là pour nuire aux gens ou soutirer l’argent des contribuables, mais pour respecter la vie d’autrui”, rappelle le parquet en propos liminaire. “Derrière les stups, la vitesse, il y a des vies brisées et des familles dévastées comme c’est le cas aujourd’hui”. Si Loïc avait respecté la limitation de vitesse, les faits auraient sûrement été différents, pointe le représentant de la société. Pour ces “manigances” pour échapper à la justice, pour avoir “faire fi des règles de prudence et d’humanité”, cinq ans de prison dont deux ans avec sursis ont été demandés.

“La tragédie est immense et entendue de ce côté de la barre”, assure Me Soizic Panefieu pour la défense de Loïc. “Qui n’a jamais commis d’excès de vitesse alors qu’il était en retard”, tente-t-elle de rappeler à chacun avant que la justice ne s’abatte sur son client. “Ses excuses sont sincères et sa prise de conscience réelle”, plaide l’avocate avant d’évoquer l’enfance de Loïc, placé à trois ans. “Il n’a pas eu la chance de grandir dans un environnement sain. Il n’a pas appris que quand on prend une voiture, on l’assure, quand on prend une voiture, on ne roule pas vite”.

Si l’avocate obtient la relaxe sur le défaut d’assurance, Loïc reste toutefois en détention. Il est condamné à cinq ans de prison dont un an avec sursis probatoire pour homicide involontaire et délit de fuite. Son permis a été annulé et il a l’interdiction de le repasser avant cinq ans. La Seat lui a également été confisquée. Il devra indemniser l’ensemble des parties civiles de sommes qui seront discutées lors d’une audience prochaine sur intérêt civil.