Prison ferme pour un détenu ayant frappé un surveillant à Domenjod

Rédigé le 07/05/2024
Régis Labrousse

Après avoir eu à juger le phénomène grandissant de l'hyperviolence en milieu carcéral, le tribunal judiciaire avait à juger ce vendredi des violences sur un surveillant pénitencier. Un agent de la prison de Domenjod avait reçu un coup de poing en plein visage par un détenu qui revenait de sa promenade.

Les faits se sont déroulés le 22 avril dernier à la prison de Domenjod. Comme le montre la vidéo diffusée par le président d’audience, alors qu’un agent pénitencier demande aux détenus de se presser pour rentrer de leur promenade, l’un d’entre eux qui vient d’entrer s’approche dudit gardien pour lui demander des explications. Après quelques longues secondes, le gardien pousse fortement le détenu qui perd l’équilibre. Il se relève et, alors que deux autres gardiens le tiennent, il parvient à porter un violent coup de poing au visage du gardien qui revenait vers lui. Le gardien est séché par le coup du détenu qui s’avère être un pratiquant de boxe.

À la barre, Jordan C. s’explique : « Il nous appelle et on lui dit qu’on arrive. Ensuite, il m’insulte. Il me dit de fermer ma gueule et il insulte ma mère », indique-t-il au président. Présente à l’audience, la victime, qui a reçu un rappel à la loi pour son geste, a une version totalement différente : « C’est faux. Je lui ai dit de fermer de sa bouche et que l’heure, c’est l’heure. Tous les jours, on essuie des insultes et on fait des rapports, mais on ne leur parle pas mal », conteste l’agent qui reconnait un geste réflexe lorsqu’il a poussé le détenu.

« Je l’ai poussé, c’était un geste réflexe »

« J’étais en colère quand il m’a poussé, j’aurais pu me faire mal à la tête », poursuit Jordan C. De son côté, le gardien a « senti qu’il voulait en découdre », et ajoute : « Je l’ai poussé, c’était un geste réflexe. C’est la première fois en vingt ans de maison qu’il m’arrive une chose pareille », conclut la victime à la barre. Le gardien a reçu de la part du parquet un rappel à la loi tandis que le détenu a déjà écopé de 30 jours de cachot suite à son conseil de discipline. Pour autant, la partie civile enfonce le clou : « La détention, c’est un rapport de force permanent, entre détenus, mais aussi avec les gardiens qui représentent l’autorité et ils méritent le respect. Le détenu est dans la provocation en refusant de rentrer. Comme il n’accepte pas les ordres, il vient demander des comptes », fustige la robe noire

Pour la procureure de la République, « il va directement vers lui, c’est son premier réflexe (…). Il voit rouge et il porte un coup de poing« . « Si le réflexe du surveillant dépasse un tout petit peu les limites, de toute façon ça allait aller au clash comme le rapporte la victime. Le message doit être clair. Il y a un mauvais réflexe du surveillant, mais la réponse de frapper est inacceptable« , conclut le parquet qui requiert 1 an de prison avec maintien en détention.

« Il encourt la perpétuité et il ne sait pas quand il sera jugé »

« Mon client vient lui parler, avec les bras le long du corps, il n’y a rien de menaçant », répond la défense qui s’interroge : « Est-ce dans le code de déontologie des surveillants d’invectiver un détenu et ensuite de le pousser en le faisant voler sur trois mètres ? C’est lui qui a provoqué le clash, pas Jordan C », plaide la défense qui pointe également l’état émotionnel instable de son client qui est en détention provisoire dans un dossier d’assassinat en cours d’instruction : « Il est actuellement mis en cause dans une affaire où il encourt la perpétuité et il ne sait pas quand il sera jugé », conclut la robe noire. Jordan C. est finalement condamné à 6 mois de prison ferme qu’il commence à purger immédiatement.

« Nous étions présents aux côtés de notre collègue lors de cette audience, pour lui témoigner notre total soutien et notre solidarité. Nous sommes satisfaits de la réponse pénale rapide de la juridiction qui reconnait l’agression de notre collègue avec une peine d’emprisonnement ferme. Cela s’inscrit après une réponse disciplinaire exemplaire prise par la commission de discipline du centre pénitentiaire de Saint-Denis. Le message est clair, lorsqu’on agresse un personnel pénitentiaire, on s’expose à de lourdes sanctions« , témoigne Vincent Pardoux, du syndicat FO pénitentiaire, à la sortie de l’audience.